Introduction pour la table d’infos de ce dimanche 25 sept sur la revendication d’abolition de la viande

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De la lutte pour le véganisme à la revendication d’abolition de la viande


Le thème de l’abolition de la viande a été débattu pour la première fois en août 2005 dans le cadre des Estivales de la question animale (http://question-animale.org). La réflexion s’est prolongée les années suivantes sur un blog personnel : http://abolitionblog.blogspot.com/ et sur des listes de discussions sur Internet.

Des actions en faveur de cette revendication sont aujourd’hui organisées dans des dizaines de pays différents, à l’occasion notamment, chaque année, d’une Journée mondiale pour l’abolition de la viande (fin janvier), ou des Semaines mondiales d’actions pour l’abolition de la viande (cf. le site http://meat-abolition.org).

Il s’agit d’abolir l’élevage, la pêche et la chasse des animaux pour leur chair, ainsi que la vente et la consommation de chair animale.
Parce que la production de viande cause un tort considérable, en souffrance et en mort, à un nombre immense d'animaux, alors qu’il n'est pas nécessaire d'en manger.
Les activités qui causent des torts majeurs à autrui ne relèvent pas de la liberté de chaque individu. Il appartient à la société de les interdire par la loi.
La capacité de nos sociétés à accorder une vie décente et une mort sans souffrance aux animaux dont la chair est commercialisée pour être mangée reste à établir.
Quoi qu’il en soit, la viande nécessite de tuer les animaux pour un produit qui n’est nécessaire ni pour être en bonne santé, ni même pour jouir d’une alimentation plaisante.

On peut adhérer à cet objectif que l’on pense, ou non, que l’appartenance à l’espèce humaine est en soi un critère éthique pertinent. On peut y adhérer que l’on désire, ou non, accorder des droits fondamentaux aux animaux sur le modèle de certains droits humains. En pratique, abolir la viande, c’est, de fait, accorder aux animaux le droit de ne pas être maltraités ni tués pour être mangés par des humains.

Nous parlons de viande par simplicité. Dans la pratique, l’abolition que nous souhaitons concerne l’ensemble des produits animaux (lait, oeufs, etc) utilisés pour l’alimentation.
En effet, la consommation de ces produits n’est nullement nécessaire à une alimentation saine et :
- Les animaux concernés (vaches, poules...) sont tués aussi pour faire de la viande ;
- Les veaux que fait naître la production de lait sont tués pour la viande ;
- Les poussins mâles (nés de souches de poules pondeuses) sont tués peu après leur naissance ;
- Et comme pour la viande, la capacité de nos sociétés à accorder une vie décente à ces animaux reste à établir. Etc.

On voit donc qu’en pratique, la revendication d’abolition de la viande n’est que la transcription au niveau de la société tout entière de ce que proclament déjà depuis longtemps les végétariens, les végétaliens et les vegans.

Dès lors, quelle différence y a-t-il avec la promotion du végétarisme ou du veganisme ?
Cette promotion, dans les faits, vise à ce que les individus, un à un, décident de changer leurs habitudes de consommation et cessent de manger de la viande.
La revendication d’abolition de la viande est une démarche plus spécifiquement politique : elle vise à faire adhérer l’opinion publique à l’idée que la viande doit être abolie. Elle s’adresse moins tant au consommateur qu’au citoyen. L’objectif est que les sociétés humaines, les unes après les autres, décident d’interdire sa production, son commerce et sa consommation.

Certains affirment qu’il n’est pas démocratique de vouloir imposer l’abolition de la viande.
Mais les arguments en faveur de l’abolition de la viande doivent pouvoir être exprimés et discutés sur leurs propres mérites. Serait-ce démocratique de vouloir empêcher le débat sur la légitimité de la viande ?

Le refus de manger de la viande peut être vu comme un boycott à caractère politique, comme l’expression de son soutien à la revendication d’abolition, à l’image des 300 000 personnes qui, à la fin du 18e siècle en Grande-Bretagne, boycottaient le sucre des plantations esclavagistes en pleine campagne pour l’abolition de la traite des esclaves.

Au delà des végétariens, de nombreuses personnes questionnent déjà elles aussi la légitimité de l’élevage, de la chasse et de la pêche. Ainsi, en France :
- 14 % des personnes interrogées répondent qu’elles ne sont pas d’accord* avec l’affirmation “Il est normal que l’homme élève des animaux pour leur viande”;
- 39 % ne sont pas d’accord avec l’idée qu’il est normal “qu’on puisse tuer un animal à la pêche”;
- 58,8 % ne sont pas d’accord avec l’idée qu’il est normal “qu’on puisse tuer un animal à la chasse”.

Mais les changements spontanés de comportement des consommateurs ne constituent pas une force suffisante pour mettre fin à la boucherie. Il y a diverses raisons à cela. C’est d’ailleurs une situation très commune : on ne réussit pas non plus à résoudre les problèmes de l’insécurité routière, de la pollution, de la misère humaine, de la maltraitance des enfants en comptant uniquement sur la capacité de chacun à modifier ses habitudes pour y porter remède, même lorsqu’il est largement admis qu’il s’agit de maux.

Prôner l’abolition de la viande est la continuation logique du végétarisme, du végétalisme et du véganisme. Les anti-corrida ne font pas que demander aux gens de boycotter les ferias, ils demandent l’interdiction de la corrida. Les opposants au foie gras ne se contentent pas de déconseiller aux gens d’en acheter, ils veulent obtenir l’interdiction du gavage. Idem pour les opposants à l’esclavage, au travail des enfants, etc. Pourquoi les opposants à la viande seraient-ils les seuls à se restreindre aux conseils individuels ?

Le mouvement pour l’abolition de la viande n’appartient à personne, pas plus que la campagne pour l’abolition de l’esclavage n’appartenait à un cercle restreint ; il constitue un objectif à atteindre, une perspective pour orienter nos stratégies, un horizon concret qui peut nous réunir et galvaniser nos énergies, et nous espérons que chacun, que chaque organisation saura œuvrer pour sa réalisation en fonction de son génie propre.

Pour cette raison, nous n’envisageons pas de créer de structure particulière ; ni organisation pour la chapeauter, ni même fédération ; un réseau entre les individus et structures engagées semble suffisant pour échanger aussi bien des informations que des points de vue stratégiques et mettre nos efforts en commun lorsque cela s’avère profitable.

Le mouvement est ouvert à tous et toutes ! Il a besoin de vous !

* Personnes se disant "plutôt pas d'accord" ou "pas d'accord du tout" parmi les 1.000 personnes interrogées pour l'étude de Geneviève Cazes-Valette, « Le rapport à la viande chez le mangeur français contemporain », novembre 2004, page 83, http://www.esc-toulouse.fr/m_pages.asp?page=480&menu=234
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Texte de présentation reçu pour introduire la table d’infos qui sera tenue par Yves Bonnardel ce dimanche 25 septembre 2011 lors du Resto Trottoir, place Marulaz, dès 13h. Un débat pourra s’ensuivre en fonction des intéressé.e.s…